Optimisation des espaces de travail (Partie 1)

Labo Pharma : Stratégies Lean

Les laboratoires de contrôle qualité pharmaceutique jouent un rôle vital en veillant à la qualité des produits médicaux et à leur conformité aux normes réglementaires. Une gestion efficace de ces laboratoires est cruciale pour obtenir des résultats fiables et assurer une réponse rapide. Dans cet article, on va essayer d’explorer diverses approches pour organiser les espaces de ces laboratoires afin d'optimiser les ressources et d'accélérer la fourniture des résultats, soulignant l'importance d'une structure bien pensée pour répondre aux défis de manière efficace.

Chimiste utilisant un mètre pour mesurer et planifier l'aménagement des espaces d'un Laboratoire de Contrôle Qualité (LCQ) dans le cadre d'une stratégie Lean Lab.
Optimisation des espaces de travail dans un Laboratoires de Contrôle Qualité

Le retour d’expérience des professionnels a montré que la disposition physique des salles dans le laboratoire influence directement l'efficacité des opérations. Ainsi s’organiser en zones dédiées, permet une bonne fluidité dans l’exécution des tâches et une meilleure gestion du flux de travail. Les analystes se sentent à l’aise et se concentrent mieux quand les espaces de travail sont bien délimités et dédiés à chaque type d’analyse ce qui contribue aussi à réduire les erreurs et à accélérer les processus. L’agencement des salles et des postes de travail s’effectue généralement en suivant une certaine logique basée sur l'évaluation des flux de chaque activité en fonction des types de contrôle à réaliser.  

Pour aller plus loin, je vous invite vivement à écouter notre podcast dédié : un débat riche, clair et très utile : 


Phase 1 : Le Détective en Laboratoire – Évaluation des Flux et Diagnostic (Approche Lean Lab)

L’évaluation des flux de travail est une étape capitale dans l'optimisation des espaces utiles d'un laboratoire de contrôle qualité pharmaceutique. Cette démarche vise à analyser et comprendre comment les différentes tâches et activités sont organisées et interconnectées au sein d’un laboratoire. 
Avant de déplacer une paillasse ou d'acheter un nouvel équipement, nous devons enfiler notre casquette de détective. L'évaluation des flux de travail est l'étape diagnostique du Lean Lab. Elle vise à débusquer ce que le système japonais appelle le Muda, c'est-à-dire le gaspillage, et à identifier les goulots d'étranglement (bottlenecks).

1.1. Le VSM (Value Stream Mapping) : L'Art de Rendre l'Invisible Visible

L'outil central, le Value Stream Mapping (VSM), est votre radiographie du labo. Il force à confronter le temps de valeur ajoutée TVA (le temps d'analyse réel) au temps de traversée total (Lead Time ou délai de libération du lot, tel qu'il est vécu par le laboratoire lui-même et son client interne (la production ou la logistique). Préparez-vous à une douche froide : dans la plupart des laboratoires non optimisés, le temps d’analyse réel représente souvent moins de 40 % de ce Lead Time interne. Le reste, c'est de l'attente, du transport, de la relecture, de l'archivage... bref, du gaspillage !"

Sachant que cette analyse n'est pas propre aux LCQ : dans des milliers de cartographies VSM réalisées dans tous les environnements de services et de flux discrets (ingénierie, administration, laboratoires...), il est récurrent de constater que le rapport TVA/Lead Time dépasse rarement 40 %. Dans les cas les moins optimisés, ce temps de travail réel peut même tomber à 15 % ou 10 % du délai total ! Le reste, comme on a dit, c'est du gaspillage qui signale un flux non optimisé.


Diagnostic Clé (VSM)

Analogie et Conséquence

Implication Stratégique

Temps de Traversée >> Temps d'Analyse (Ratio 10:4)

Le produit passe 60 % de son temps en salle d'attente. Votre labo est un aéroport surchargé.

Problèmes de logistique, d'attente, de transfert (Flux non optimisé). Nécessite une réorganisation spatiale drastique.

Taux d'Erreurs Élevé à une étape donnée (par ex., la pesée)

L'analyste jongle entre trois documents, le téléphone sonne, et la balance est à 15 mètres de l'ordinateur. L'environnement est votre ennemi.

Problème de concentration, d'ergonomie, ou d'équipement partagé. Nécessite une zone dédiée par tâche, isolée des distractions.

Stock Exagéré d'échantillons en cours

Vous stockez plus de produits que la semaine de travail. Le FIFO est mort.

Le flux n'est pas régulé. L'espace de stockage temporaire est mal géré. Nécessite une réorganisation des zones tampons et une régulation du flux d'entrée (Heijunka).


Note pour la Définition Contextualisée du Lead Time :

Dans l'optique de l'optimisation interne du laboratoire d'analyse, le "Lead Time" est défini comme :

Lead Time Optimisé :

Lead Time = "Arrivée de l'échantillon au LCQ"  jusqu'à "la Validation finale et sortie du certificat d'analyse"

Cette période englobe tout ce que le laboratoire peut contrôler et optimiser à travers la réorganisation spatiale, l'amélioration des flux, la réduction des attentes entre les étapes (attente du QC Reviewer, attente de l'équipement, attente du LIMS, etc.). C'est le délai qu'on cherche à réduire en modifiant l'espace et les processus internes.

Lead Time Global (Le Contexte Business) :

Lead Time = "Début de la production"  jusqu'à "Libération du lot pour le client final" 

Ce délai est le "délai de libération du lot" au sens macroscopique. Il inclut le temps de fabrication, la quarantaine, l'analyse LCQ, la libération Assurance Qualité, et l'expédition. L'optimisation du laboratoire (votre sujet) impacte directement cette métrique globale, mais elle ne la définit pas seule.

1.2. La Chasse aux 8 Gaspillages (Muda) en CQ

Pour vraiment débloquer l'espace et le temps, le Lean nous enseigne à traquer les huit formes de gaspillage, que nous traduisons ici dans notre contexte BPF :

1. Défauts (D) : Analyses OOS/OOT dues à des erreurs de manipulation, confusion ou mauvaise préparation. Le remède : Postes de travail dédiés, procédures claires (Poka-Yoké) et formation continue des analystes.

2. Surproduction (S) : Tester des échantillons avant qu'ils ne soient nécessaires ou préparer trop de solutions mères. Le remède : Tirer le flux par la demande (principe Pull), ou avoir une visibilité sur les produits a prendre en charge par le labo au moins une semaine à l'avance.

3. Attente (A) : Attendre l'approbation d'un superviseur, l'étalonnage d'un instrument, ou la fin d'une colonne HPLC. Le remède : Mise en place de points de décision et de technologies connectées.

4. Non-Utilisation des Compétences (N) : Un expert HPLC passe son temps à faire la plonge, tâches manuelles ou la maintenance du matériel.. Le remède : Clarification des rôles et organisation par tâche ou débouché.

5. Transport (T) : Déplacer un échantillon d'un bâtiment à l'autre pour la même analyse. Le remède : L'objectif ultime est de rapprocher physiquement les étapes séquentielles pour créer un flux continu, par exemple en regroupant les postes de travail par famille de produits ou par technologie analytique. Pour les flux incompressibles (laboratoires en étage, zones isolées), il faut optimiser les moyens de transfert en investissant dans des solutions logistiques efficaces :

  • Pass Box ou fenêtres de transfert (pour les échantillons entre zones de propreté différentes ou pour juste gagner du temps et plus de sécurité).

  • Convoyeurs ou systèmes de transport automatisés (pour les volumes élevés entre des zones distantes).

  • Monte-charge ou lifts dédiés pour les échantillons et les standards (dans les bâtiments à plusieurs étages).

  • Chariots ergonomiques et bien identifiés (pour réduire les risques de confusion et les efforts de l'opérateur).

6. Inventaire (I) : Trop de réactifs, de substances de référence ou d'échantillons en cours. Le remède : Optimisation des zones de stockage (5S).

7. Mouvement (M) : L'analyste se déplace inutilement (chercher un document, un réactif, la poubelle). Le remède : Le Diagramme en Spaghetti.

8. Excès de Traitement (E) : Faire des vérifications ou des contrôles supplémentaires non requis par le protocole ou la réglementation. Le remède : Simplification des procédures.

1.3. Cartographie des Mouvements : L'Analyse CSI du Labo (Diagramme en Spaghetti)

Pour transformer l'espace, il faut d'abord visualiser le chaos. Le Diagramme en Spaghetti trace les mouvements physiques réels du personnel et des échantillons. Si vous obtenez un schéma qui ressemble à un plat de nouilles trop cuites , c'est que votre labo est physiquement contre l'efficacité. La question qui peut venir c'est comment peut-on réaliser ce suivi sur le terrain ? Eh bien, l'histoire révèle le moyen d'un chronomètre et un plan, mais ce suivi est désormais automatisable. Pour une analyse de type "CSI", cette fameuse série télévisée américaine "Crime Scene Investigation" (Les Experts), le laboratoire peut s'appuyer sur des technologies de pointe comme le RTLS (Real-Time Locating System). Des balises discrètes portées par le personnel permettent de tracer les déplacements en temps réel, offrant une cartographie des mouvements (le "spaghetti") d'une précision irréfutable.

Rôle Stratégique : Si l'analyse révèle que 40 % du temps d'un analyste est passé en déplacement entre la paillasse humide et l'HPLC, la solution n'est pas d'acheter une deuxième HPLC (solution classique, coûteuse et inefficace), mais d'adopter un modèle "par tâche" qui rapproche ces deux postes. L'analyse des mouvements dicte la solution spatiale et rend la décision stratégique irréfutable, même pour le DAF.

Technologies et Flux Numérique : L'analyse doit également inclure l'impact potentiel de l'automatisation. La rationalisation des flux d'échantillons via l'installation de Pass Box, de convoyeurs, ou de monte-charge dédiés doit être évaluée. De même, l'impact des outils numériques est crucial : un simple poste LIMS bien positionné (à la paillasse plutôt qu'au fond du bureau) peut éliminer le besoin pour un analyste de faire des allers-retours pour la saisie des données. Sur une journée, la suppression de ce flux papier et des déplacements associés peut se traduire par l'élimination de plus de 100 mètres de trajet inutiles et de précieuses minutes d'attente.

Analyste en laboratoire utilisant un chariot ergonomique et identifié pour le transport sécurisé des échantillons, réduisant le gaspillage de Transport (Muda) et les risques de confusion.
Une chimiste utilise un chariot de laboratoire pour le transfert des échantillons

Phase 2 : Le Choix du Modèle – Arbitrages, Stratégie et Alignement Business 

Le choix de l'agencement du laboratoire n'est pas un choix de décoration, mais une décision stratégique découlant directement des données de flux (Phase 1) et des priorités business de l'entreprise (BPF, Time to Market, Coût).

2.1. Les Trois Modèles et leurs Arbitrages (Quand Choisir Quel Outil ?)

Nous avons trois principaux modèles pour organiser le laboratoire. Chacun a son contexte idéal et son talon d'Achille. Le rôle de l'expert CQ est de choisir l'outil adapté au problème identifié.

A. Modèle de structuration par Spécialité (Organisation Fonctionnelle)

Ce modèle est l'approche traditionnelle dans de nombreux laboratoires, héritée d'une logique d'expertise technique et de conformité BPF.
Il s'agit d'une pratique courante destinée à prévenir toute contamination croisée et à maintenir des conditions optimales pour les tests spécifiques réalisés dans chaque zone, préservant ainsi les exigences environnementales et réglementaires propres à chaque type d'analyse. Cette approche implique la création de deux ou plusieurs zones distinctes. je peux donner l'éxemple de la microbiologie et la physico-chimie, qui sont complètement isolées l'une de l'autre. Cette structuration est non seulement fonctionnellement nécessaire mais répond également à la logique de séparation des deux domaines d'expertise, chacun ayant sa propre compétence scientifique et son propre personnel. Cependant, ils font partie intégrante du même processus de contrôle qualité d'un produit, visant à évaluer sa conformité aux spécifications microbiologiques et physico-chimiques établies au préalable.
En séparant ces zones, les laboratoires peuvent utiliser des équipements spécialisés et mettre en œuvre des pratiques de travail adaptées à chaque discipline. Certains organismes de réglementation, tels que les agences sanitaires ou ministérielles, imposent la séparation des zones de microbiologie et de physico-chimie pour garantir la qualité des tests et des résultats. Ces zones sont généralement désignées sous le terme de "Laboratoire": On dit laboratoire de physico-chimie, laboratoire de microbiologie..etc

Avantages :

  • Haute Expertise Technique : Facilite la montée en compétence des analystes sur des instruments complexes.
  • Conformité et Sécurité : Simplifie la gestion des conditions environnementales critiques et le confinement des risques (agents pathogènes, substances hautement actives). 

Compromis :

  • Silos Fonctionnels (Le Risque de l'Hyper-Spécialisation)  : Si la séparation entre la Microbiologie et la Physico-Chimie est justifiée par la nature des profils scientifiques, le problème survient lorsque des fonctions analytiques connexes sont inutilement isolées. Ces barrières organisationnelles (les "silos") sont contre-productives, notamment entre :
    Conséquences : Le coût réel de cette segmentation est la perte de polyvalence. L'hyper-spécialisation rend l'équipe moins adaptable aux pics de charge et entrave l'amélioration continue, car la collaboration inter-fonctionnelle est freinée.
  • Allongement du Lead Time (Temps d'Attente) : Ce modèle par spécialité conduit souvent l'échantillon à devoir voyager physiquement entre plusieurs zones. Chaque déplacement et chaque attente entre les étapes est une forme de gaspillage (Muda) qui allonge le temps total d'analyse.

    La Solution Amont : Le Plan d'Échantillonnage Partagé

    Ce problème logistique peut être neutralisé dès la phase de prélèvement. L'approche stratégique consiste à établir un Plan d'Échantillonnage Partagé :

    1. L'échantillon est prélevé en quantité suffisante.

    2. Il est immédiatement divisé et dédié à chaque fonction requise (ex : une partie pour la Microbiologie, une autre pour la Stabilité, etc.).

    Ainsi, chaque laboratoire reçoit directement sa quantité dédiée, éliminant la circulation du flacon entre les départements et réduisant le Lead Time de manière significative.

B. Modèle de structuration par Tâche ou par Flux Unitaire (Organisation Lean)

Ce modèle est directement inspiré des principes du Lean Manufacturing et vise l'efficacité opérationnelle maximale.
Le modèle de structuration par tâche repose sur la séparation physique des étapes chronologiques au sein d'un même flux d'analyse ou d’une même spécialité, que celle-ci soit de nature microbiologique ou physico-chimique. Cette approche vise à organiser de manière cyclique et méthodique le déroulement des activités liées à une analyse spécifique, garantissant ainsi une exécution efficace et ordonnée du processus.  


Schéma illustrant le cycle de vie complet et séquentiel d'une analyse physico-chimique (réception, préparation, analyse, validation) pour une structuration optimale par flux unitaire (Lean).
Le cycle de vie d'une analyse en physico-chimie

Concrètement, cette structuration par tâche implique la division du flux d'analyse en étapes distinctes, chaque étape représentant une phase clé du processus global. Chacune de ces phases est alors exécutée dans une salle disposée de manière séquentielle, suivant un ordre prédéfini. Par exemple, dans le cas d'une analyse microbiologique, les étapes pourraient inclure : 
Pour une analyse physico-chimique, cela pourrait englober des étapes telles que :
  • La réception des échantillons.
  • La pesée.
  • La préparation des échantillons et solutions d’analyse.
  • Lecture et instrumentation. 
  • Le traitement des données, documentation et archivage.
D’autres tâches qui sont considérées comme un support essentiel au déroulement d’une analyse pouvant aussi suivre le même raisonnement nécessitant des zones supplémentaires telles que :  
Cette approche offre plusieurs avantages. Elle permet une meilleure organisation des ressources, avec une allocation efficace du temps et des compétences nécessaires à chaque phase. De plus, elle facilite le suivi et la gestion de chaque tâche, permettant ainsi d'identifier rapidement toute déviation ou inefficacité potentielle au cours du processus d'analyse. En outre, cette structuration par tâche favorise une approche plus spécialisée, avec une concentration spécifique sur les exigences particulières de chaque étape, contribuant ainsi à la précision et à la qualité des résultats obtenus.
On peut la résumer en quelques notes :

Principe : 
  • L'espace est agencé pour suivre la séquence des étapes analytiques, minimisant les mouvements (Diagramme en Spaghetti) et les attentes. Par exemple, le poste de préparation, la zone d'injection et le poste de documentation sont adjacents.
Contexte Idéal : 
  • Fort volume d'analyses routinières et standardisées (ex: tests de dissolution, analyses de routine des produits finis). L'objectif est de traiter rapidement et en continu un flux constant d'échantillons similaires.
Avantages :
  • Efficacité Maximale : Réduction drastique des Muda (transport et mouvement), accélération du temps de traversée (Lead Time).
  • Flux Tiré : Favorise une organisation "juste-à-temps" et une meilleure visualisation de la charge de travail.
Compromis :
  • Faible Flexibilité : Difficile à adapter en cas de changement de méthode ou de l'introduction d'un nouvel instrument.
  • Duplication : Peut nécessiter la duplication d'équipements si plusieurs flux unitaires sont créés.

C. Modèle de structuration par débouché ou par Client (Organisation Produit)

Ce modèle met l'accent sur la réactivité et la satisfaction d'un "client" interne ou externe spécifique. On entend par débouché, les éléments sortants d’un processus d’analyse désignant la ou les parties intéressées par le résultat d’analyse. Ces derniers peuvent être désigné sous la dénomination « Client ». 

L'organisation du laboratoire par débouché d'analyse, où chaque équipe séparée physiquement ou temporellement, peut apporter plusieurs avantages, notamment une expertise approfondie dans chaque domaine, une efficacité accrue des processus et une meilleure gestion des ressources. Voici quelques exemples qui caractérisent ce modèle :

  • L'analyse des matières premières et des articles de conditionnement primaires et secondaires alimente le lancement de la fabrication du produit fini, avec la production en tant que client.
  • L'analyse du produit fini contribue à la libération des produits finis pour la vente, avec la distribution ou le commercial comme clients.
  • L'évaluation de la stabilité du produit fini offre des données relatives à sa qualité sous diverses conditions de stockage. Cette démarche vise à confirmer l'efficacité du procédé de fabrication au cours de la formulation pharmaceutique, ainsi qu'à valider les premiers lots du lancement, assurant ainsi la conformité du produit pendant sa période de conservation indiquée sur l'étiquette. Les destinataires potentiels de ces résultats englobent différents acteurs tels que les départements de développement galénique et analytique, l'assurance qualité et réglementaire, et l'équipe en charge de la commercialisation.
  • Le flux d'analyse pour la validation des méthodes aboutit à une instruction d'analyse spécifique du produit fini, avec le contrôle qualité comme client.
  1. Identifiez les principaux débouchés d'analyse dans votre laboratoire, tels que le contrôle qualité des produits finis, la stabilité, le développement des méthodes, l'analyse des matières premières, etc. 
  2. Établissez une liste claire des types d'analyses spécifiques nécessaires pour chaque débouché.
  3. Formez des équipes spécialisées, chacune dédiée à un débouché d'analyse spécifique, composée de membres ayant une expertise approfondie dans le domaine. 
  4. Clarifiez les responsabilités de chaque équipe en fonction de son débouché d'analyse.
  5. Assurez-vous que les équipes comprennent clairement leur rôle dans l'ensemble du processus du laboratoire. 
  6. Créez des mécanismes de coordination et de communication entre les équipes, avec des réunions régulières pour partager des informations, discuter des défis potentiels, et assurer une collaboration transparente. 
  7. Implémentez des systèmes d'information intégrés pour faciliter la communication entre les équipes et assurer une gestion efficace des données.
  8. Favorisez le développement continu des compétences pour rester à jour avec les avancées technologiques et les exigences réglementaires. 
  9. Assignez spécifiquement les équipements nécessaires à chaque équipe en fonction de ses besoins particuliers. 
  10. Gérez les ressources humaines de manière à optimiser l'utilisation des compétences spécialisées de chaque équipe. 
  11. Développez des procédures standardisées pour chaque débouché d'analyse afin d'assurer une cohérence et une qualité constantes, en veillant à les mettre régulièrement à jour en fonction des évolutions normatives. 
  12. Mettez en place des mécanismes d'évaluation régulière des performances de chaque équipe en utilisant des indicateurs de performance clés (KPI) pour mesurer l'efficacité opérationnelle et la qualité des résultats. 
  13. Prévoyez des équipes ou des comités transversaux pour gérer des projets qui nécessitent la collaboration de plusieurs spécialistes, garantissant une approche holistique lorsque cela s'avère nécessaire, par exemple, des projets de développement de méthodes pouvant nécessiter une étroite collaboration avec l'équipe de contrôle qualité des produits finis.
En quelques notes :

Principe : 
  • Une équipe et une zone d'équipement sont entièrement dédiées à un type de produit, une gamme spécifique ou un client. (Par exemple, une zone unique gère les matières premières, une autre les produits finis). L'équipe devient polyvalente
.
Contexte Idéal : 
  • Exigences de forte réactivité pour des lots urgents, ou pour des produits très sensibles (ex : études de stabilité nécessitant une équipe dédiée de A à Z). Favorise la notion de "propriété" complète du processus.

Avantages :
  • Réactivité Business : Les décisions sont prises rapidement sans dépendre d'autres services.
  • Propriété du Flux : L'équipe est responsable de la qualité et du délai, améliorant l'engagement et la traçabilité.
Compromis :
  • Moins de Standardisation : Les méthodes peuvent diverger légèrement entre les équipes.
  • Duplication d'Équipements : Entraîne souvent la nécessité d'acheter plusieurs exemplaires du même appareil (ex : un nombre d’HPLC de routine répartie dans 3 zones au lieu d’une zone centralisée).

Modèle de Structuration

Contexte Idéal

Avantage Clé (Le Bon Élève)

Compromis (Le Mauvais Côté)

Par Spécialité

Risque de contamination élevé (Microbiologie, HAPI), labo de R&D avec besoin d'expertise très pointue et d'équipements lourds.

Conformité BPF et prévention des risques maximisées (zones classées, séparation physique). La sécurité d'abord.

Crée des silos fonctionnels (le chimiste parle rarement au microbiologiste), peut allonger le délai d'analyse global (transport entre zones).

Par Tâche (Flux Unitaire)

Fort volume d'analyses répétitives et standardisées (routine, dissolution, dosage HPLC).

Efficacité et Débit optimisés pour la production (réduction des temps de transition, application du Flow Lean).

Faible flexibilité face aux imprévus (une panne bloque la chaîne), peut générer une dynamique d'équipe "usine" (moins d'autonomie intellectuelle).

Par Débouché (Client)

Nécessité de réactivité forte pour un client interne spécifique (ex: Libération Urgente de lots, Stabilités).

Réactivité Business et focalisation client (équipe dédiée, expertise transversale). L'équipe est responsable de A à Z pour un produit ou un client.

Risque de duplication d'équipements et d'isolation des experts techniques (moins de partage de connaissances entre équipes produit).


En conclusion de cet article, je souhaite souligner l'importance vitale de l'organisation spatiale dans nos laboratoires de contrôle qualité pharmaceutique. Les approches explorées, de l'évaluation des flux de travail à la structuration par débouché, offrent des solutions novatrices pour optimiser nos ressources, accélérer la fourniture des résultats, et répondre de manière efficace aux défis qui jalonnent notre domaine.

Note de l'auteur

Cette première partie a permis de poser les fondations d’une organisation rationnelle et performante du laboratoire, en explorant les approches clés pour comprendre et maîtriser les flux d’activité. Nous avons vu comment le Lean Lab, le VSM et les différents modèles de structuration (par spécialité, par tâche ou par débouché) constituent les piliers d’une efficacité mesurable et durable.
Cependant, dans la réalité du terrain, aucun modèle n’est parfait : chaque laboratoire a sa propre personnalité, son humeur du jour et ses petites contraintes – réglementaires, techniques ou humaines – qui viennent parfois bousculer la théorie. Même les meilleures cartes de flux n’ont jamais prévu le café renversé sur le classeur BPF.
C’est précisément ce constat qui ouvre la voie à la deuxième partie de notre réflexion : l’approche hybride, une méthode pragmatique qui marie la rigueur BPF à la souplesse Lean, pour transformer l’espace de travail en véritable levier stratégique de compétitivité et d’innovation — sans oublier d’y ajouter une bonne dose de réalisme… et un brin d’autodérision.

Reda LOURGUIOUI
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